Cet avis ne correspond pas aux processus politiques internationaux actuellement en place pour lutter contre le réchauffement. Ils ne sont pas centralisés au niveau décisionnel. Chaque nation a le droit d’adhérer ou non à un traité ou des objectifs de réduction. Il n’y a donc pas de gouvernance mondiale pour lutter contre le réchauffement. Il y a des accords passés entre les nations, comme c’est le cas dans bien d’autres domaines. Il est quand même étrange de reprocher aux nations de collaborer ensemble pour leur bien commun… Concernant l’atteinte aux libertés individuelles, cette peur vient souvent de personnes qui se méfient de toute intervention étatique et de toute contrainte, que ce soit une taxe, une nouvelle loi, un nouveau règlement. Là aussi, il suffit de creuser un peu pour admettre que ces craintes ne tiennent pas la route. Toute société est basée sur des règles communes. La liberté illimitée n’a jamais existé. De nombreuses règles de vivre ensemble sont en vigueur depuis des siècles et tout le monde en bénéficie pour vivre dans la paix et l’ordre. Si la lutte contre le réchauffement climatique a urgemment besoin de nouvelles règles de vivre ensemble, alors tout le monde va en bénéficier. Finalement, mieux vaut devoir restreindre provisoirement certaines libertés individuelles pour le bien des générations futures (par exemple interdire l’immatriculation de véhicules trop gourmands), plutôt que de ne rien faire et de se retrouver, dans 20 ou 30 ans, de facto, dans une situation où beaucoup de libertés individuelles n’existeront tout simplement plus à cause des conséquences dramatiques du réchauffement ! Une fois que l’eau aura monté de 2 mètres, alors oui, les populations auront perdu leurs libertés individuelles : elles devront fuir.
Le réchauffement climatique n’est ni de gauche, ni de droite. C’est une réalité physique et non pas une idéologie. En revanche, les mesures pour lutter contre ce réchauffement peuvent clairement avoir un positionnement politique. Jusqu’à aujourd’hui, c’est principalement la gauche qui s’est inquiétée du climat et qui a fait des propositions concrètes. Cela a donné l’impression que la cause climatique fait le lit de la gauche. Le vide laissé par la droite doit être comblé… par la droite ! C’est à elle de faire des propositions ambitieuses. Bon nombre de politiciens de droite se sont déjà mis au travail. Cela montre que le cliché « Je soutiens le climat donc je soutiens des idées de gauche » n’est pas fondé. Nous devons refuser les « packages idéologiques » dans lesquels nous sommes si souvent enfermés et qui paralysent l’action politique en faveur du climat.
A titre de rappel, de nombreux scientifiques, en particulier les climatologues, mettent en évidence le lien entre la croissance économique sans limite et la menace importante qui pèse sur l’équilibre climatique mondial. En effet, ils démontrent que la croissance économique continue est basée sur les énergies fossiles émettant de plus en plus de gaz à effet de serre, et que ces émissions menacent le climat. De plus, les perturbations climatiques sont déjà visibles et attestées aujourd’hui dans différentes parties du monde.
Malgré ce constat, nous pourrions penser que le développement économique de notre région et notre richesse matérielle personnelle sont le résultat automatique du salut de notre âme et de l’assurance de la vie éternelle. Penser que la richesse matérielle, une santé parfaite et la vie éternelle sont une bénédiction de Dieu et une récompense directe et automatique de la rédemption des péchés n’est pas ce que la Bible nous enseigne.
Anne-Catherine Piguet, théologienne protestante, a écrit un article complet, critique et édifiant au sujet de la théologie de la prospérité1. Selon elle, cette théorie affirme que si un croyant est malade et pauvre, c’est de sa faute parce qu’il est dans le péché et dans une nature satanique. Et s’il a la foi, il est automatiquement en bonne santé, sauvé et riche matériellement. Cette théorie affirme aussi que Jésus-Christ lui-même a eu une nature satanique lorsqu’il a été crucifié sur la croix jusqu’à sa résurrection.
La majorité des théologiens rejettent cette vision spirituelle. En effet, la Bible n’affirme pas un lien automatique entre le salut de l’âme, la santé et la richesse matérielle. De même, il n’y a pas de lien automatique non plus entre le péché qui entraînerait directement la pauvreté, la maladie et une nature satanique de l’homme. Le danger de cette vision est d’affirmer que la pauvreté est une question de mauvaise moralité et que les pauvres sont donc directement responsables de leur misère. En conséquence, ils ne méritent ni aide financière, ni compassion, puisqu’ils sont eux-mêmes coupables de leur situation. Le deuxième danger de cette vision est que la richesse matérielle et la liberté de la recherche du profit infini sont considérés comme une bénédiction de Dieu automatiquement attribué au pécheur repenti de sa nature satanique. Cette affirmation bloque de facto de nombreuses solutions constructives à la crise climatique. En effet, elle va directement à l’encontre de la remise en question de la société de consommation de masse dans laquelle nous vivons aujourd’hui, de sa croissance sans limite et de la pollution qui en découle en termes de gaz à effet de serre.
Nous pourrions penser, en tant que chrétiens, que la spiritualité consiste essentiellement à sauver son âme en acceptant la grâce du Christ et à inciter les autres à en faire de même au moyen de la mission sans se préoccuper du monde matériel et naturel. Par conséquent, nous pourrions penser que nous devons être « neutres », car il s’agit d’un sujet politique, économique ou scientifique et non spirituel. Nous pourrions également penser que chaque chrétien est libre d’avoir son opinion sur cette question et d’agir ou non en faveur de l’écosystème et du climat, l’essentiel de la foi n’étant pas concerné par cette question. Tout d’abord, il existe un consensus scientifique quasi total sur le fait que les activités humaines sont la cause principale du réchauffement climatique depuis le début de la Révolution industrielle (19ème siècle). Mais la Bible donne-t-elle aussi une réponse ou des indications à ce sujet ? Oui, car l’Ancien Testament considère que Dieu, l’humanité et le reste de la Création sont étroitement liés, si bien que le péché des hommes affecte non seulement notre relation à Dieu, mais aussi la relation aux autres créatures, avec la terre et son système, avec des mentions explicites de perturbations climatiques. Le péché d’Adam et d’Eve n’a pas comme seule conséquence leur séparation d’avec Dieu, la terre se met à produire des épines et l’agriculture devient plus difficile (Genèse 3.17-19). De même, la Bible parle de la façon dont la terre « souffre » (Jérémie 12.14) et « pleure » (Osée 4.1-3) à cause du péché du peuple de Dieu. La Création « vomit » les habitants d’Israël l’Infidèle (Lévitique 18.25-28), tandis qu’elle attend la rédemption. Attention cependant à ne pas simplement « spiritualiser » nos actions matérielles, et à penser qu’il suffirait à l’humanité de ne plus pécher moralement pour que la crise climatique soit résolue comme par miracle. Nos désobéissances qui détruisent le climat, ce ne sont pas nos meurtres, nos adultères et nos tromperies, mais nos excès de consommation, nos excès de combustion des énergies fossiles, nos excès d’émissions de GES (Gaz à effet de serre). En conclusion, en se basant sur la Bible, le comportement des hommes affecte la terre entière, ce qui inclut le climat. Et si leur comportement influence le climat dans un sens négatif, c’est-à-dire qu’il met en péril le monde naturel, les espèces vivantes et, in fine, l’existence de l’être humain lui-même, la « neutralité » du chrétien actuel à l’égard de la crise climatique contredit de manière évidente la vision biblique de l’amour de Dieu pour l’homme et la Création et la responsabilité que Dieu a donné à l’homme envers celle-ci.
Tout d’abord, quoique Dieu puisse envisager pour l’avenir de notre planète, nous avons reçu un mandat qui est d’obéir à son commandement de prendre soin de la terre (Genèse 1.26 ; 2.15).
Historiquement, ce n’est qu’après la révolution industrielle que l’idée de la destruction totale s’est répandue chez les chrétiens, parallèlement au début de la pollution et de l’exploitation économique de masse et à grande échelle. La pollution, les conditions de travail extrêmes et la misère du 19ème siècle ont-elles favorisé l’idée d’une destruction totale et imminente de la planète parmi les chrétiens? Peut-être. Pourtant, selon le théologien Dave Bookless (directeur de la théologie d’A Rocha), cette idée repose sur de mauvaises traductions de quelques textes bibliques très peu nombreux et difficiles à comprendre.
Par exemple, quand Jésus dit « Le ciel et la terre passeront, mais mes paroles ne passeront pas » (Matthieu 24.35), l’accent est mis sur la crédibilité des paroles de Jésus et non pas sur le caractère temporaire de la terre et du ciel. Jésus utilise des figures de style ou des métaphores qui étaient déjà utilisées dans les Psaumes de l’Ancien Testament. Par exemple, dans le Psaume 102.25-27, les choses les plus durables que l’on peut imaginer, comme la terre et les cieux, sont comparées au pouvoir de Dieu et à sa parole. Les Psaumes et les autres passages de la Bible mettent généralement l’accent sur la permanence et la stabilité de la création plutôt que sur son instabilité et sa fragilité. Dans le Psaume 93.1, on peut lire « Le monde est ferme, il ne vacille pas ». Dans le Psaume 96.10, nous pouvons lire : « Le Seigneur est roi. Le monde est ferme, il ne vacille pas ». « Tu as affermi la terre et elle subsiste » (Psaume 119.89-90). L’un des passages les plus cités par les personnes qui pensent que le monde est voué à la destruction complète est le suivant (2 Pierre 3.10-13) : « 10 Le jour du Seigneur viendra comme un voleur; en ce jour, les cieux passeront avec fracas, les éléments embrasés se dissoudront, et la terre avec les œuvres qu’elle renferme sera consumée. 11 Puisque donc toutes ces choses doivent se dissoudre, quelles ne doivent pas être la sainteté de votre conduite et votre piété, 12 tandis que vous attendez et hâtez l’avènement du jour de Dieu, à cause duquel les cieux enflammés se dissoudront et les éléments embrasés fondront! 13 Mais nous attendons, selon sa promesse, de nouveaux cieux et une nouvelle terre, où la justice habitera. » (traduction de Louis Segond)
Selon Dave Bookless, un examen approfondi de ce texte révèle une signification bien différente que la destruction totale du monde. Il s’agit de remettre ce passage dans son contexte. Premièrement, il établit un parallèle entre la destruction de la terre par l’eau à l’époque de Noé (verset 5-7) et la destruction par le feu au retour de Jésus : cela suggère que ce qui est envisagé est un jugement purificateur plutôt qu’une destruction totale.
Deuxièmement, la mention du feu aurait rappelé aux auditeurs juifs le feu du fondeur (Malachie 3.2-3) et beaucoup de traductions modernes suivent les anciens manuscrits qui utilisent le mot grec « eurethesetai » qui signifie « mise à nu » ou « révélé » dans le verset 10, plutôt que « consumé par le feu ». Et troisièmement, les éléments (stoicheia) qui sont détruits par le feu ne sont probablement pas les éléments physiques ni chimiques, mais les forces spirituelles élémentaires que la mort du Christ a vaincues. En conclusion, le passage traite clairement d’un jugement purificateur plutôt que d’une complète destruction.
Un autre point fondamental à considérer dans la Bible se rapporte au terme grec utilisé pour parler de « nouvelle » création, de la « nouvelle » terre, des « nouveaux » cieux et de la « nouvelle » Jérusalem. Ces termes se retrouvent dans les écrits apocalyptiques, c’est-à-dire principalement dans l’Apocalypse, mais aussi dans divers livres du Nouveau et de l’Ancien Testament. A titre de rappel, le Nouveau Testament a été écrit en grec ancien et cette langue a deux mots pour dire « nouveau » : neos qui signifie entièrement neuf et kainos qui suggère le renouvellement, la rédemption et la restauration. Le Nouveau Testament utilise toujours kainos quand il s’agit de la nouvelle création, mettant ainsi l’accent sur le fait que l’acte final de Dieu à travers Jésus consiste non pas à détruire la Création, qu’il a déclarée bonne, et à créer des choses nouvelles, mais à « renouveler » toute chose (Apocalypse 21.5). En d’autres termes, il s’agit de purifier, de renouveler et restaurer la Création avec Christ en son centre.
En conclusion, ce que la Bible met en lumière, ce n’est pas la destruction de la terre, mais un jugement purificateur qui fait disparaître tous les effets du péché et de la chute, avant que le Christ soit à nouveau Seigneur, et que toute chose dans le ciel et sur la terre ne soit encore une fois sous son autorité (Éphésiens 1.10). Dans Romains 8.21, l’apôtre Paul exprime son grand espoir qu’un jour « cette même création sera libérée de l’esclavage du périssable pour avoir part à la liberté glorieuse des enfants de Dieu ».
P.S. nous pouvons ajouter à cette réponse que nous savons tous que nous allons mourir un jour et que notre corps va être détruit. Cela ne nous empêche pas d’en prendre soin et aucun chrétien de bon sens ne se dit : « ce n’est pas grave de me droguer, de fumer, de manger n’importe quoi, de rouler à contre-sens sur l’autoroute car de toute façon je vais mourir et mon corps va être détruit ».
Nous pourrions penser qu’en tant que chrétiens nous devrions uniquement nous occuper à sauver des âmes, et vivre comme si la Bonne nouvelle de l’évangile ne concernait pas les questions matérielles. Dans cette vision, s’occuper du changement climatique serait une diversion qui nous éloignerait de notre tâche essentielle. Bien que notre mission de faire de toutes les nations des disciples reste absolument essentielle dans la mission du chrétien, nous sommes aussi appelés à nous préoccuper, comme Jésus l’a fait, des personnes dans leur intégralité, prenant en compte leur contexte physique. Selon le théologien Dave Bookless (directeur de la théologie d’A Rocha), la vision hébraïque de la Bible refuse de séparer les aspects spirituels et matériels de la réalité. La tradition hébraïque rejette en effet la vision dualiste du monde et considère le monde comme un tout, le spirituel et le matériel étant intimement liés. Par exemple, dans le Genèse, après avoir créé chaque élément du monde matériel et naturel, Dieu a dit « qu’il était bon ». Par la suite, dans l’Ancien Testament, de nombreuses personnes en chair et en os ont incarné et transmis les messages spirituels de Dieu, et parfois même agi en son nom. Dans le Nouveau Testament, Dieu a envoyé son fils comme un être de chair et l’a ressuscité physiquement en tant que fruit d’une nouvelle création matérielle. La vision dualiste du monde qui a influencé la pensée occidentale et en partie la vision chrétienne provient des philosophes grecs Aristote et Platon. Pour ces derniers, il existe deux mondes séparés : le monde spirituel et le monde matériel. De plus, le monde spirituel est bien plus important que le monde matériel. Plus tard dans l’histoire, les scientifiques et philosophes René Descartes et Francis Bacon (17ème siècle) ont réaffirmé la dualité du monde en séparant les questions spirituelles et matérielles. René Descartes a considéré la nature et les animaux comme des machines inanimées totalement indépendantes de Dieu. Ces philosophes ont grandement influencé la pensée occidentale également. Pourtant, au 21ème siècle, les neurosciences ont largement démontré que le fonctionnement de l’esprit et du corps sont intimement liés et vont donc dans le même sens que la vision hébraïque de la Bible qui ne sépare pas non plus ces deux notions. Comme la Bible ne sépare pas le spirituel et le matériel, le « Royaume de Dieu » n’est pas un concept purement intellectuel, mais cela signifie la Seigneurie de Jésus-Christ sur l’âme et la vie de chaque personne et sur tout ce qui constitue la société des hommes, comme l’économie, la politique et l’écosystème notamment. En fait, il comprend la totalité de la création de Dieu. A la fin de l’Évangile de Marc, Jésus envoie en mission des disciples dans le monde pour « proclamer la bonne nouvelle (l’Évangile) à toute la création » (Marc 16.15). Enfin, lorsque l’annonce de l’évangile s’accompagne d’actes manifestant concrètement le souci de Dieu pour le monde entier, et ne se contente pas de paroles, elle devient bien plus puissante. Source : Marc Roethlisberger et Steve Tanner, FAQ, Déclaration Urgence Climat Suisse.
Nous pourrions penser, en tant que chrétiens, que la crise climatique est l’affaire de Dieu, car c’est lui qui s’en occupe et donc nous n’avons pas à nous préoccuper de ce problème. Dieu est tout-puissant, il maîtrise tout, et donc nous ne devons pas nous mêler de quelque chose que nous ne pouvons de toute façon pas maîtriser. De plus, la foi concerne avant tout sa vie personnelle, sa famille, son église de quartier et son travail et pas les grands problèmes mondiaux, car Dieu les gère selon son plan.
Tout d’abord, si nous nous référons à l’histoire de Noé, dans Genèse 6 à 9, nous constatons qu’un changement climatique important et destructeur a lieu. Le jugement de Dieu est mis en œuvre avec la destruction quasi complète du monde et sa miséricorde est également accordée à Noé et aux animaux de son arche, sauvés du déluge et de la destruction. On constate que le plan était complètement divin, mais que c’est un homme, Noé, qui l’a mis en œuvre. Dieu aurait pu faire un bateau lui-même, mais il a délégué cette tâche à Noé. Comme dans beaucoup d’autres passages bibliques, Dieu choisit des agents et c’est une intervention humaine qui accomplit les plans de Dieu. De plus, Dieu a souvent une compréhension plus grande du plan et de sa finalité que l’agent humain lui-même. Dans le cas de Noé, le plan de Dieu était plus profond que le sauvetage de Noé et de quelques animaux d’un désastre, car il s’agissait de créer une alliance éternelle entre lui et la Création. Dans le chapitre 9 de la Genèse, nous constatons que l’alliance de Dieu ne concerne pas seulement les hommes, dans le texte : « vous et vos descendants », ce qui nous inclut aussi nous-mêmes, mais également toute la Création, à savoir « toute créature vivant sur la terre » et « la terre elle-même » (Genèse 9, verset 13).
Ces versets bibliques nous appellent à être des agents de Dieu et à nous responsabiliser au lieu de tout lui remettre pour se réfugier dans une forme de passivité et de déresponsabilisation. Dans beaucoup d’épisodes de la Bible, comme dans le Psaume 8, Dieu se sert des hommes pour agir et, à l’instar de tous ces héros bibliques, nous sommes appelés à l’écouter aujourd’hui et à agir de manière responsable en regard des grands problèmes mondiaux, comme le réchauffement climatique.
Le fait d‘admettre un impact de l’homme sur le climat nous rappelle aussi que Dieu a créé des lois qui régissent le monde physique. Une grande partie du savoir humain est consacré à la découverte et à l’étude de ces lois, au travers des sciences dites exactes. La connaissance scientifique n’est pas une négation de Dieu, mais un chemin de découverte de sa grandeur et de son génie. Si la Bible affirme que Dieu est au-dessus de tout, il a soumis sa création aux règles physiques qu’il a lui-même choisies, et qu’elle ne peut pas bafouer. Vivre dans la vérité, c’est aussi vivre dans la connaissance et le respect de ces lois physiques. Dans la Bible, Satan tente Jésus en lui demandant de défier les règles physiques en se jetant en bas du Temple (Luc 4:11). Derrière cette demande se cache son désir de voir le Christ commander Dieu même. La réponse de Jésus est claire : « Tu ne mettras pas Dieu à l’épreuve ». Nous ne devons pas non plus mettre Dieu à l’épreuve en ignorant les principes physiques du climat et en exigeant de Dieu qu’il répare les dé-réglages massifs que nous faisons subir au système atmosphérique.
A titre de rappel, l’augmentation moyenne de la température mondiale due principalement aux activités humaines a commencé au début de la révolution industrielle, soit vers 1800. Toutefois, l’existence du système économique et politique qui est à l’origine de ce phénomène remonte à plus loin dans le temps. Certains auteurs datent le début de ce système au 15ème siècle avec la Renaissance en Italie du nord et l’invention de la comptabilité, et en Allemagne avec l’invention de l’imprimerie et la naissance du protestantisme. D’autres citent le Bas Moyen-Âge avec un commerce florissant en Méditerranée grâce aux Croisades et au grand développement des ordres monastiques, source de développement économique.
Le développement économique a assurément des côtés positifs et négatifs et l’influence de la spiritualité chrétienne sur celui-ci est certainement importante et complexe. Dans Genèse 1.28, nous pouvons lire cette bénédiction et exhortation de Dieu envers les hommes : « Dieu les bénit en disant : – Soyez féconds, multipliez-vous, remplissez la terre, rendez-vous en maîtres, et dominez les poissons des mers, les oiseaux du ciel et tous les reptiles et les insectes ». De nombreux auteurs, dont des théologiens, ont souligné que les versets de la Genèse qui « exhortent l’homme à dominer le monde et tous les animaux de la terre » a eu une grande influence sur la pensée occidentale et son système économique. Ils ajoutent également que ces versets ont été mal compris et mal interprétés, car la notion de responsabilité envers la Création a été oubliée ou, en tout cas, mise au second rang des priorités.
Nous considérons donc que la spiritualité chrétienne a eu une influence historique importante sur le système économique dans lequel nous vivons aujourd’hui, y compris dans ses effets négatifs, à cause d’une mauvaise interprétation de certains passages bibliques et de l’oubli d’autres textes dans lesquels Dieu donne une responsabilité importante à l’homme envers la Création et exprime son amour pour tout ce qu’il a créé. Les fondements théologiques exposés dans le texte de la déclaration d’urgence climat suisse passent en revue ces passages bibliques pour une approche plus responsable et équilibrée de l’être humain en regard de la crise climatique actuelle.
Les chrétiens devraient certainement s’engager dans le large éventail des mouvements écologiques et de conservation de la nature déjà existants. Cependant, des organisations comme A Rocha ont un rôle clé à jouer dans l’éducation et la mise au défi des Eglises, ainsi que dans les liens à établir entre l’environnement et la reconnaissance de valeurs clairement morales et spirituelles. De nombreuses associations écologiques n’ont aucune idée réelle de l’importance des espèces peu connues. De plus, si nous croyons que prendre soin de la création fait partie de l’établissement du Royaume de Dieu « sur la terre comme au ciel », alors il devient normal d’avoir des mouvements écologiques chrétiens, tout comme il est normal d’avoir des agences chrétiennes d’aide au développement ; les deux sont une expression de l’amour de Dieu au travers de son peuple.
(question extraite du livre de Dave Bookless, Dieu, l’écologie et moi, Appendice 1, « les pourquoi ? de la planète »)
Cette question est intéressante, car elle sous-entend que Dieu peut désirer intervenir et s’attaquer au changement climatique, tandis que notre objectif prioritaire serait de construire l’Église et de laisser le problème du climat à Dieu. Le meilleur moyen de répondre, c’est de faire une comparaison avec ce qui est arrivé à l’époque de Noé (Genèse 6 à 9). Comme aujourd’hui, cette époque a subi un changement climatique immense et destructeur. À la fois la miséricorde de Dieu et son jugement ont été mis en œuvre. Les plans de Dieu étaient totalement divins, mais il a choisi une intervention humaine pour les accomplir. Dieu aurait pu fournir un bateau sans aucune aide de la part de Noé, mais, comme ailleurs dans l’Écriture, il a choisi d’appeler un être humain pour qu’il soit son agent. La vision de Dieu était plus large que ce que Noé n’a probablement jamais compris. Il ne s’agissait pas simplement de sauver quelques animaux, mais d’instaurer une alliance qui incluait toute la création. Dans le chapitre 9 de la Genèse, nous lisons encore et encore que l’alliance salvatrice de Dieu concerne non seulement les hommes (« vous, et vos descendants »), mais aussi « toute créature vivant sur la terre » et même « la terre elle-même » (verset 13). Les desseins salvateurs de Dieu sont toujours bien plus larges que ce que notre imagination limitée peut concevoir, et il nous appelle constamment à saisir cette vision plus étendue.
C’est arrivé quand le peuple d’Israël a compris petit à petit qu’il était destiné à être « la lumière des nations » (Ésaïe 46.6) et au moment où l’Église primitive a découvert qu’elle était appelée à témoigner « jusqu’aux extrémités de la terre » (Actes 1.8). À mon sens, c’est ce qui se passe aujourd’hui : l’Église universelle découvre que se soucier de la création fait partie de l’appel et que « la création attend avec impatience la révélation des fils de Dieu » (Romains 8.19).
(extrait de Dave Bookless, “Vers une théologie du changement climatique”, Évangile et changement climatique, édité par E. Hobbs, J.F. Mouhot, C. Walley, Je sème, Dossier Vivre n°40, 2017, p.15 et suivantes) [PDF disponible gratuitement ici]
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